Martin Rappeneau vient de sortir son 3ème album « 1800 désirs » et nous en avons parlé ensemble pour vous sur Influence. On à toujours l’impression de le découvrir comme si c’était le premier album . « 1800 désirs » est à la fois un peu plus mélancolique que les précédents et à la fois très tourné vers l’avenir. Vous l’aurez compris je me suis entretenu avec cet artiste pour vous et nous avons évoqué quelques idées sur la vie et la musique.
Votre nouvel album sort trois ans après « L’âge d’or », est-ce qu’un tel écart était voulu et nécessaire à votre création ?
Oui c’était un écart imposé par mon rythme de travail. Moi j’aime bien avoir du temps pour mettre à plat les mélodies que j’ai souvent du mal à accepter. Il faut vraiment du temps pour que la chanson rentre en moi, même si je peux très rapidement écrire une chanson. Après vraiment je la rejoue et la rejoue, je la laisse reposer, je la rejoue, je la rechante pour la voir arriver à ce que je veux et ne rien regretter dans ce qu’elle est. Donc le temps de diviser deux ans et demi par douze chansons c’est à peu près ça.
Votre Album est plus mélancolique que les deux précédents, dans quel état d’esprit l’avez-vous composé ?
Alors je n’avais vraiment pas fait attention à ça en l’écrivant ni en l’enregistrant et c’est une fois qu’il est sorti comme me l’a fait remarquer dans les premières interviews. Ca m’a un peu étonné car je n’étais pas du tout mélancolique en le faisant mais il doit y avoir du coup quelque chose d’inconscient dans cette période de ma vie qui a amené cette couleur-là à l’album. Après j’espère aussi qu’il n’y a jamais quelque chose de complètement plaintif, car moi il y a toujours des pulsations dans mes chansons et quelque chose qui avance donc j’espère quand même que l’on trouve derrière chaque chanson le côté pop qui fait avancer les choses et qui ne laisse pas dans un truc juste triste.
En même temps on l’imagine très bien sur scène dès la première écoute, l’avez-vous travaillé comme ça ?
A la fois oui et à la fois non. Dans l’orchestration je les ai toujours travaillées de la même manière, piano/voix ou guitare/voix pour que vraiment les harmonies soient assez fortes. Moi, pour tenir seul sur scène mon piano est là, je rentre sur scène seul au piano avec un quatuor de cordes et en fait le spectacle avance comme ça . J’y ai pas spécialement pensé en faisant l’album, peut-être à la limite vers la fin du disque.
Le titre est « 1800 désirs », avez-vous réussi à mettre tous les vôtres dans ce nouveau disque ?
Il y a des grands espoirs, des chemins ouverts, de l’espérance et des rêves, moi c’est ce qui me fait avancer. Et c’est aussi ce que dit la chanson « j’ai 1800 désirs qui traînent » je trouve un peu dangereux parfois de passer à côté des choses si on a justement trop de désirs qui traînent, on peut passer à côté des gens et évidemment aussi de la personne qui compte pour vous. C’est un peu ce que veut dire ce chiffre choisi au hasard de l’inspiration.
On peut entendre également le morceau « Sans armure » qui est l’actuel single, le message général est de profiter et de vivre à fond, est-ce que vous vous appliquez ce conseil au quotidien ?
Oui le premier et le deuxième album étaient un peu dans la problématique de se débarrasser de ses fantômes, de laisser le passé pour être présent. Et dans « 1800 désirs » il y a quelque chose tourné vers l’ouverture, et un regard tourné vers l’avenir un peu plus heureux même s’il y a toujours un peu de solitude et de mélancolie. Il faut assumer l’avenir et non pas le temps qui passe.
Vous chantez « Et solitaire et solitude », la solitude vous fait-elle peur ? Et êtes-vous quelqu’un de solitaire ?
Non la solitude ne me fait pas peur du tout, j’en ai même plutôt absolument besoin autant que j’ai besoin de l’autre. Et solitaire, oui aussi, parfois on me le reproche, car parfois ça devient un peu de l’égoïsme. J’adore cette chanson qui est un texte de Didier Golemanas qui a pris comme ça deux termes solitaire et solitude qui pourraient se ressembler et qui sont différents.
Justement quand Didier Golemanas ou encore Jean Louis Dabadie posent leurs mots sur vos mélodies, quel effet cela fait ?
Ce que j’aime beaucoup dans ces collaborations-là, c’est que d’abord on apprend à se connaître, donc une fois qu’ils posent leurs mots c’est pas comme ça sur une musique reçue dans la boîte aux lettres. C’est des gens avec qui on a fait des repas, on a écouté des disques et quand ils posent leurs mots j’ai l’impression qu’ils visent juste parce qu’ils me connaissent. Ils savent qui je suis, d’où je viens et ça confirme notre relation quand je reçois leurs textes.
Sur votre site officiel on peut suivre en vidéo toute la préparation de l’album et ainsi voir vos angoisses, vos doutes et le chemin des chansons, qui a eu cette idée originale ?
C’est à la fois original mais aussi un peu dans l’âge d’utiliser Internet, c’est assez simple de mettre un peu ce qui vous concerne dessus et à vous après de le rendre intéressant. Donc on s’est dit que faire des petits films sur le making of de l’album pendant un an ça serait sympa, en plus c’était juste une petite caméra avec une seule personne et pas une espèce de truc chiant comme une grosse équipe télé. On s’est dit autant profiter d’Internet pour ne pas mettre que des vieux clips et je me suis engagé à ouvrir les portes de la création, par exemple on nous voit travailler avec Dabadie et tout est vrai, on n’a pas du tout répété avant.
Sur la pochette de l’album on retrouve encore votre côté un peu dandy à la française comme Julien Clerc ou Michel Berger à qui on vous compare souvent, cultivez-vous ce look ?
En fait je n’aime pas trop prendre la pose, avec ce truc image on laisse de côté l’instinct. Mais c’est peut-être juste le jean sur la pochette qui fait ça (rires). Non j’essaye de pas trop être dandy justement dans ce que je suis, par contre ce qu’on peut voir sur la pochette c’est que c’est la première fois que j’ai les yeux ouverts et que je regarde un peu dans les yeux l’auditeur, il y a quelque chose de « Sans armure » justement.
On a toujours l’impression que les médias vous redécouvrent à chaque album comme si c’était le premier, et vous oublient un peu par la suite, partagez-vous ce sentiment ?
Oui il y a toujours le côté un peu outsider. Parfois je me dis mais mince il est où le tube ? Et par moment, non ça ne me dérange absolument pas, mais c’est vrai qu’il y a ce côté-là de moi avec les médias, en même temps je vois ça de l’intérieur donc je me rends pas bien vraiment compte pour tout vous dire. Mais rassurez-vous,il ne faut pas s’inquiéter pour moi.
Pensez-vous que c’est, sans être péjoratif, parce que vous êtes un peu à contre-courant de ce que l’on appelle la « Nouvelle scène » ?
Je ne sais pas, je sais que je ne rentre pas dans une case, moi ce que je propose ce sont vraiment des chansons car j’ai envie de me concentrer là-dessus et pas sur autre chose. Je n’ai pas un univers très travaillé, très coloré, à l’instar de ce que je vois avec Sliimy qui a vraiment un travail de code sur ce qu’il est. Moi ce qui m’intéresse c’est d’écrire des chansons, des textes qui vont passer l’épreuve du temps comme dirait Sinclair. Peut-être à tort donc qui sait le prochain album sera peut être pirouettes et grands costumes de cirque.
On dit de vous que vous explosez littéralement sur scène, c’est là où vous vous sentez le mieux ?
Je me sens bien sur scène mais je me sens bien aussi en studio, j’adore écrire et être en studio. Mais sur scène je peux faire un peu plus le con que sur le disque et je suis un peu plus débridé car on peut parler entre les chansons. Mais ça va je suis aussi extrêmement à l’aise en studio.
Vous avez fait l’Olympia en première partie de Nolwenn Leroy et de Gad Elmaleh mais toujours pas en tête d’affiche, c’est voulu ou c’est juste une question de programmation ?
Oui la plus grande salle que j’ai faite c’était le Casino de Paris. C’est nous en fait qui décidons, l’Olympia il faut y aller pour moi en force, quand on est vraiment à la hauteur, avec une chanson qui vous porte vraiment et une salle pleine à craquer. Il ne faut pas y aller juste pour dire de faire l’Olympia, il y a des gens qui le font car l’image est bonne de le faire et on sentait que c’était pas encore tout à fait ça. Moi j’irai quand ça sera le moment.
Vous serez du 12 au 27 juin en Australie pour cette tournée, pourquoi justement ce pays et comment vous sentez-vous face à cette idée ?
En fait le concept que l’on fait avec un quatuor de cordes c’est de choisir un quatuor qui existe dans le pays où on joue, on l’a déjà fait dans toute la France, en Suisse et en Belgique. Là, l’idée c’est que la personne qui s’occupe de l’alliance française, et qui fait tourner des groupes français en Australie, s’occupe aussi de quatuor et comme elle a adoré l’idée de partager la musique avec la scène locale, voila elle nous a programmé en Australie et aussi loin et étrange que cela puisse paraître je suis content et j’ai hâte d’y aller.
Le nouveau single est déjà prévu ?
Alors pour l’instant on hésite entre deux, ça se prépare doucement et on va décider la semaine prochaine car il y en a bien un de prévu.
Un message pour nos lecteurs pour terminer cet entretien ?
Et bien portez-vous bien et en musique, c’est la meilleure chose possible tant que la santé est là.